L’automédication peut être très dangereuse si l’on ne connaît pas les effets secondaires d’un médicament et les conséquences de sa surconsommation sur la santé publique. Dans la plupart des pays, un organisme de réglementation sélectionne les médicaments en vente libre pour s’assurer qu’ils sont sûrs et efficaces lorsqu’ils sont utilisés sans les conseils d’un médecin. Par exemple, le paracétamol est disponible en vente libre dans le monde entier. Toutefois, une surdose de paracétamol pouvant être mortelle, certains pays limitent le nombre de comprimés vendus.
Dans de nombreuses régions du monde, les antibiotiques sont proposés sans ordonnance, avec peu ou pas de restrictions quant aux quantités vendues, ce qui aggrave le problème de la résistance aux antimicrobiens. Les antibiotiques en vente libre sont souvent utilisés incorrectement pour soigner une maladie non bactérienne - et donc inefficaces.[1] Ces médicaments sont en outre administrés sans connaître les éventuelles allergies du patient. Et sans savoir médical, le fournisseur des médicaments en vente libre peut délivrer des antibiotiques pour une période plus courte ou à des doses plus faibles que celles recommandées.
Cet accès facilité aux antibiotiques en vente libre, combiné à toutes les fausses idées sur leur utilisation, a créé un cercle vicieux de surconsommation qui a entraîné une résistance croissante aux antimicrobiens. Des études ont en effet démontré que les bactéries résistantes aux antimicrobiens sont beaucoup plus courantes dans les communautés qui utilisent fréquemment des antibiotiques en vente libre.[1]
Les antibiotiques sont encore largement disponibles sans ordonnance dans la plupart des pays en développement, où l’on estime que leur accessibilité pour les personnes malades est plus importante que les conséquences de leur surconsommation. Pourtant, les autorités de santé n’ont jamais sérieusement calculé le coût de la mise en place d’un système de prescription d’antibiotiques et d’autres médicaments par rapport aux ressources nécessaires pour faire face à une augmentation de la résistance aux antibiotiques. De plus, l’opinion publique, les mauvaises habitudes et les idées reçues au sujet des antibiotiques empêchent de modifier facilement le système actuel de vente libre.
Par exemple, la Malaisie, pays à revenu intermédiaire supérieur, interdit la vente libre des antibiotiques.[2] En vertu de la loi malaisienne sur les poisons, l’achat d'antibiotiques nécessite l’ordonnance d’un médecin. Cependant, même si les ventes d’antibiotiques sans ordonnance sont contrôlées, le nombre de prescriptions d’antibiotiques reste élevé dans les établissements de santé publics et privés.[2] Cela laisse supposer que la mise en place d’un contrôle des prescriptions médicales d’antibiotiques, en plus de la régulation des ventes libres, constitue l’étape suivante dans la réduction du mésusage des antibiotiques.
Références
1 Morgan, D. J., Okeke, I. N., Laxminarayan, R., Perencevich, E. N., & Weisenberg, S. (2011). Non-prescription antimicrobial use worldwide: A systematic review. The Lancet Infectious Diseases,11(9), 692-701. doi:10.1016/s1473-3099(11)70054-8
2 Rahman, N. A., Teng, C. L., & Sivasampu, S. (2016). Antibiotic prescribing in public and private practice: A cross-sectional study in primary care clinics in Malaysia. BMC Infectious Diseases,16(1). doi:10.1186/s12879-016-1530-2